L'usine




En janvier 2006, je pose mon sac chez Deshoulières, à Chauvigny, le berceau de la porcelaine en Poitou.

Quatre-vingt ouvriers y produisent de la vaisselle en porcelaine (assiettes, tasses, soupières, cafetières, etc.) depuis 1838 dans une des plus grandes usines de porcelaine de France.
In January 2006, I settled in at Deshoulières, in Chauvigny, where porcelain first started up in the Poitou region.

Porcelain tableware (plates, cups, coffee pots and so on) has been produced there since1838 in one of France's largest porcelain factories. Today, eighty people work there.

Le site Deshoulières de Chauvigny
The Deshoulières factory in Chauvigny

Ce site combine toutes les étapes de la fabrication, de la pâte au décor en passant par les trois façonnages possibles : coulage, estampage et injection.

Depuis maintenant six ans, j’y travaille au minimum les trois premiers jours de la semaine. Le 21 février 2012 et les jours suivants, cela s'est passé à peu près ainsi :
This site covers all stages in production, from mixing the basic paste to the final decoration, using three possible shaping methods: casting, stamping and injection. 

For six years now, I have been working there at least the first three days of every week. On 21 February 2012 and the following days, it went something like this:

















Pour résumer, après avoir réalisé des moules tout en me réappropriant certains des moules « maison », je travaille par montage successif d'éléments collés à la barbotine. Évidemment, je laisse voir la trace du travail avec ses coulures, ses coutures striées, ses apport de matières. Après séchage, les pièces sont cuites une première fois à 980°. C'est le dégourdi, qui peut ensuite être émaillé et cuit à 1280° pour donner la porcelaine.

En fait, ce que je raconte dans toutes mes sculptures, ce dont je parle sans cesse dans ce travail, c'est de ma fascination pour cette usine.
Cela devient le sujet récurrent. Il est clair que je n'aurais pas fait ces sculptures dans un autre lieu ou seul dans mon atelier, ou plutôt j'en aurais fait d'autres. Je suis intimement imprégné de cet environnement, de ces bruits, de cette odeur, de ces horaires, de ces gens que je côtoie avec plaisir.

Que ce soient la cafetière dite «haute», les anses de tasse «Montespan», la soupière «7 et demi» que je rehausse ou un petit vase que je tronçonne, toutes ces sculptures trouvent leur source, leur énergie dans tout ce fatras industriel de plus d'un siècle. C'est le vocabulaire "maison" revu, revisité, reconstruit pour faire un signe nouveau et rendre hommage à ces gens, à cette histoire.
To sum up: after making casts by appropriating a number of "house" moulds to my own ends, I work by gradually assembling components glued together with slip. Obviously, I leave visible traces of this work, with all the drips, ridged joins and added material. After drying out, the pieces are fired for the first time at 980°. This is the biscuit firing, after which they can be glazed and fired at 1280° to produce porcelain.
 

The story I tell in all my sculptures, and the aspect that appears endlessly in my work, is my fascination with this factory.   
This has become a recurring subject. It's clear that I would never have made these sculptures in another place, or alone in my own workshop – or rather, I would have made others. I am deeply imbued with this environment, with these noises, this smell, these hours, and all these people I so happily spend time with.

Whether it's the so-called "tall" coffee pot, the "Montespan" cup handles, the “seven-and-a-half" soup tureen which I make higher, or the little vase I cut down, all these sculptures take their source and energy from this industrial hotchpotch that goes back more than a century. This work is the "house" vocabulary revised, revisited and reconstructed to create new symbols, paying tribute to these people, and to this history.